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article paru dans la gazette des armes 526 de janvier 2020
L’inhumanité telle que vécue par les amateurs d’armes.
mardi 28 janvier 2020, par ,
Jadis, l’interdiction de posséder une arme, ou l’inscription au FINIADA, étaient prononcées par un magistrat. Ces décisions faisaient suite à une instruction suivie d’un jugement, lorsqu’un magistrat estimait qu’un prévenu, par son comportement violent ou inquiétant, présentait un danger pour la société. Même s’il y a beaucoup à dire sur le pouvoir exorbitant des magistrats français, au moins cette décision judiciaire était-elle pesée et le prévenu avait-il pu présenter son argumentation pour se défendre.
Aujourd’hui, à la moindre peccadille, c’est le préfet qui prend la décision de façon automatique ; il applique le fameux « principe de précaution ». Cette situation est compréhensible dans des cas d’urgence, quand un individu présente un comportement violent, pouvant susciter des craintes pour son entourage et dans ce cas, seul le préfet peut agir avec la rapidité nécessaire. Le même accord du préfet est nécessaire pour permettre le placement d’office en centre psychiatrique d’un individu dont le comportement est devenu inquiétant, laissant supposer des troubles psychiatriques. Il s’agit alors de situations exceptionnelles, pour lesquelles le représentant de l’état doit intervenir d’urgence pour préserver la sécurité publique.
Par contre, couramment nos adhérents nous informent de décisions de dessaisissement prises en relation avec des antécédents. Depuis l’entrée en vigueur de la loi de 2012 [1], la liste des crimes, délits et infractions pouvant déboucher sur une interdiction totale de détention d’arme est extrêmement large. Cette liste s’étend des pires crimes ( terrorisme, meurtre avec barbarie, enlèvement suivi de séquestration, viol en réunion, etc.), au moindre problème administratif (oubli de renouvellement des autorisations trois mois avant l’échéance, même en cas de force majeure, carnets de tir incomplets ou autre infraction à la législation des armes.). Ces faits très anciens, parfois largement antérieurs à la loi de 2012, interdisent la détention d’armes à toute personne qui a été condamnée pour infraction. Cela alors que les intéressés n’ont plus commis aucune infraction depuis des décennies et n’ont manifesté aucun comportement violent ou inquiétant. Le détenteur qui se trouve alors sommé de se dessaisir de ses armes, tombe des nues, d’autant plus que depuis les faits, il a souvent bénéficié d’autorisations et de renouvellements.
Selon les cas, la procédure de dessaisissement est contradictoire [2], c’est-à-dire que le détenteur peut présenter ses observations. Parfois, c’est un simulacre, la préfecture ne fait pas mention de son véritable motif et écoute sans débat ce que peut dire la personne dans une sorte de monologue. Mais, si les armes peuvent être saisies immédiatement sans procédure contradictoire [3], l’intéressé peut présenter ses observations et au bout d’un an recouvrer ses armes s’il a su convaincre le préfet. Pour être efficace, il devra se faire assister d’un avocat. Voir article.
Et les tireurs ?
Pour la FFTir, on observe la même évolution : jadis, le tireur qui commettait une infraction au règlement intérieur de son club, recevait un avertissement ou passait devant une commission de discipline où ses arguments étaient entendus par les membres du bureau. Les exclusions en première intention étaient rares et, pour peu que l’intéressé « se tienne à carreau », l’affaire s’effaçait au cours des années, sans porter à conséquence mais non sans avoir servi d’exemple vis à vis des autres membres.
La décision d’exclusion de la fédération était éventuellement prise à l’issue d’une procédure plus lourde mais dans laquelle la personne incriminée avait toujours la possibilité de présenter sa défense devant une commission de discipline.
Jusqu’à ces dernières années, les retraits de licence FFTir pour raison disciplinaires étaient très rares. Elles ne survenaient généralement qu’en cas de faute de comportement grave ou de non-respect des règles de sécurité.
Il semble que ces radiations de la FFTir deviennent aujourd’hui plus fréquentes et qu’elles soient parfois prononcées de façon automatique, dès qu’un licencié a le moindre problème administratif lié aux armes.
Citons le cas d’un tireur qui s’est trouvé blacklisté de la FFTir et interdit de fréquenter son club suite à un concours de circonstances tragique.
L’oubli de renouveler sa licence avait pourtant une explication humaine toute simple : l’intéressé, âgé de 75 ans, venait de perdre sa compagne à la suite d’une « longue maladie. Pendant la douloureuse période de deuil qui a suivi ce décès, l’intéressé a cessé de fréquenter son club de tir et s’est enfermé dans la dépression. En fin d’année sportive, il a également oublié de renouveler sa licence dans les délais prescrits ! On aurait souhaité qu’un des responsables de son club le contacte : d’abord pour prendre de ses nouvelles (ce sont des choses qui se font dans les petits clubs de province ou tout le monde se connaît depuis des années) et pour lui rappeler qu’il était indispensable qu’il renouvelle sa licence et qu’afin de pouvoir conserver ses armes, il s’efforce de faire acte de présence au club, au moins à l’occasion des tirs contrôlés obligatoires. Malheureusement, les responsables ont jugé plus urgent de le radier du club et de signaler l’absence de renouvellement de sa licence à la FFTir. La fédération a dès lors enclenché un cycle infernal qui a abouti au prononcé de la confiscation des armes détenues (non seulement les armes de catégorie B mais aussi celles de catégorie C, ce qui est moins compréhensible). Ces saisies et l’expulsion de son club ont contribué encore plus à enfoncer ce malheureux dans une grave dépression.
Mettre « l’humain au centre ! »
Nous constatons que nous sommes entrés dans un système inhumain dans lequel il n’existe plus aucune bienveillance ni aucune marge d’erreur. Il y a de plus en plus de cas où des sanctions sont prononcées de façon automatique, soit par l’administration, soit par les représentants de la FFTir en oubliant totalement la présomption d’innocence.
Tout ceci n’est pourtant pas totalement nouveau, mais nous assistons à l’accélération d’un processus déjà ancien, dont l’origine semble remonter à 1958 date à laquelle ont été élargis les pouvoirs de décision dévolus aux autorités administratives et en premier lieu aux préfets.
Donc, rien n’a réellement changé dans le fond. Ce qui s’est accentué, c’est l’augmentation et la brutalité des décisions de dessaisissement à la moindre peccadille qui entretien un climat d’inquiétude, voire même de révolte chez les amateurs d’armes, de plus en plus excédés de voir bafouer des principes fondamentaux comme la présomption d’innocence et le droit de propriété.
Heureusement que le président Macron s’est engagé à remettre « l’humain au centre » , alors, « y a plus qu’à le faire… »
Nous avons reçu le témoignage d’un président de club de tir dans lequel le nombre de tireur est passé de 70 à 270 en 16 ans sans compter ceux qui n’ont fait que passer. Il nous fait part de sa lassitude d’une inhumanité vécue par les présidents. |
Voir aussi : Cet article publié dans la Gazette de janvier 2020 ( PDF ), fait partie d’un ensemble de trois articles dont : Dérives et injustice en matière d’armes peut conduire à de graves inconvénients pour celui qui en est victime et le « blacklistage » des tireurs. Par crainte le Préfet peut ordonner une saisie ! Il suffit que « le comportement laisse craindre une utilisation de ces armes dangereuse pour elles-mêmes ou pour autrui. » Se faire effacer du FINIADA et retrouver le droit de détenir des armes. Vie à l’intérieur du club de tir : comme dans toutes les associations, il est possible de contester le fonctionnement. Mais il y a toujours des dérives difficiles à vivre, |
[1] Art L312-3 du CSI qui liste les motifs de condamnation qui interdisent la possession d’une arme.