FAQ

« Réservation » d’une arme en attente d’être autorisé à l’acquérir ou à la conserver ?

mercredi 9 septembre 2020, par Jean-Jacques BUIGNE fondateur de l’UFA

Il existe un problème récurrent dans l’armurerie : un client souhaite acheter une arme de catégorie B et ne demander l’autorisation seulement quand il aura trouvé ce qui lui convient. Il est souvent d’accord pour payer l’arme. Quelle attitude l’armurier doit-il avoir ?

Il faut savoir que le contrat de vente est une convention par laquelle l’armurier s’oblige à livrer une arme, et l’acheteur à la payer. Cet accord porte sur le prix, l’arme et le transfert de propriété. Dès qu’il y a accord le contrat de vente existe : il est instantané, la vente et le transfert juridique de propriété s’effectuent en même temps, même si l’arme ne sera livrée que plus tard.
Il y a donc une distinction entre le moment juridique du transfert de propriété et la mise en possession.

Il y a un célèbre arrêt de jurisprudence (voir ci-dessous) à propos d’un armurier qui vendait des armes, en encaissait le prix, permettait à ses clients de venir tirer à son stand et ne les livrait réellement que sur la présentation des volets de l’autorisation d’acquisition. L’affaire est allée jusqu’en cassation et il a été condamné : ses acheteurs n’étaient pas autorisés au moment de l’achat.

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En aucun cas, l’armurier ne devra permettre au futur propriétaire de tirer avec une arme qui n’est pas encore à lui.
En résumé :
Il faut éviter tout ce qui s’apparente à un contrat de vente, dans la mesure où ladite vente est impossible tant que « l’acheteur » n’est pas en capacité de contracter parce qu’il n’a pas son autorisation.

La solution

Un armurier peut réserver une arme pour son client et demander un dépôt de garantie. Mais en aucun cas il ne doit délivrer de facture : celle-ci serait la matérialisation juridique du contrat de vente finalisé et l’on vient de voir qu’il n’est pas possible de passer un contrat de vente avec un acheteur non autorisé.
La somme encaissée ne peut pas être un acompte, car ce mot désigne paiement partiel sur un contrat de vente sur lequel tout le monde est déjà d’accord et qui ne peut pas être annulé.
Elle ne doit pas non plus constituer des arrhes car il s’agit aussi d’une vente réputée parfaite. La seule différence est qu’elle est susceptible d’être annulée, la somme donnée pouvant être gardée par le vendeur.

Il reste donc la réservation.

Un armurier peut encaisser un dépôt de garantie assorti d’une promesse unilatérale de vente et délivrer un reçu qui atteste que ce montant sera déduit du prix de l’arme, si la vente se conclut ultérieurement.
Il est nécessaire de bien identifier l’arme, avec son matricule. Indiquer que l’armurier s’oblige à vendre cette arme dès que l’acheteur présentera son autorisation d’acquisition.
Il est sage d’indiquer un délai maximum (1 an par exemple) et ce qui se passera si le client n’a pas son autorisation : le client pourrait être remboursé d’une partie de la réservation, le reste étant acquis par l’armurier pour compenser le travail fourni et la perte de chiffre d’affaires.
Tout ceci n’est peut être pas très pratique, mais c’est la sécurité juridique.


Ces pratiques de réservation concernent essentiellement des amateurs d’armes qui ont déjà des armes autorisées et qui vont demander une nouvelle autorisation et qui veulent bloquer un modèle spécifique d’occasion.
Dès 2023, le SIA permettra de se voir délivrer une autorisation globale pour l’ensemble des armes de catégorie B, il ne sera alors plus nécessaire de réserver une arme puisqu’elle pourra être acquise immédiatement.

- voir aussi article sur le site : la vente en réméré

Célèbre arrêt de jurisprudence
Un armurier encaissait le prix des armes pour des clients en instance d’autorisation. Il leur permettait de tirer dans son stand avec l’arme ainsi vendue et ne la délivrait définitivement que lorsque le client lui présentait l’autorisation.
Il a été poursuivi pour trafic d’armes. Relaxé en 1ère instance, il a été condamné en appel et son recours en cassation a été rejeté.

Motif :

Dès lors que les parties étaient tombées d’accord sur le principe et le prix, que celui-ci avait été intégralement payé, la vente des armes était pleinement réalisée. Le déplacement des armes et des munitions hors du lieu de cession ne représentant pas, comme tentait de le faire admettre le prévenu, la condition nécessaire à cette cession. Les munitions étant initialement payées et consommées par les acquéreurs non (encore) autorisés.

Rel. L- 12/07/21