Tout savoir sur le nouveau décret du 29 juin 2018.
Information de la chambre syndicale de l’armurerie
jeudi 12 juillet 2018
A propos du décret n° 2018-542 du 29 juin, il nous a paru utile de vous présenter la note d’information de la Chambre Syndicale des Armuriers qui a participé en amont, comme tous les acteurs de la profession, les sportifs et les collectionneurs, au travail d’élaboration du décret.
Il est bien entendu que ce décret ne donne pas satisfaction sur un certain nombre de points et, certains "râleurs", s’en prennent aux acteurs qui ont travaillé sur le décret, plutôt qu’au pouvoir politique qui imposé la version définitive malgré les demandes. Il est en effet facile de critiquer ceux qui se dévouent bénévolement "pour limiter la casse". Ainsi au "café du commerce", chacun peut y aller facilement de son commentaire. Mais ceux là, on ne les a pas vu participer activement au travail sur les textes proprement dits.
Je suis bien placé pour dire que chacun a fait de son mieux dans sa spécificité dans l’intérêt de notre "petit monde" des armes. Ainsi je rappelle que je suis membre du bureau de la Chambre Syndicale.
Jean-Jacques Buigné, Président de l’UFA
Il y a quatre évolutions essentielles qui procèdent de la directive :
- La suppression de la catégorie D (1°) soumise à enregistrement, et le basculement des armes qui en relèvent (fusils de chasse à un coup par canon lisse) en catégorie C, soumise à déclaration.
- Le surclassement des armes neutralisées en catégorie C, alors qu’elles étaient en catégorie D.2 libres.
- Le surclassement en catégorie A de certaines armes semi-automatiques qui étaient en catégorie B.
- Le contrôle administratif des courtiers en armes, quelle que soit la catégorie.
Ce décret apporte un certain nombre de simplifications administratives pour les armuriers ainsi que pour les chasseurs et les tireurs.
Voici les principales :
Les réducteurs de son ne sont plus soumis à autorisation pour la catégorie B et à la déclaration pour la catégorie C. Ces réducteurs ne sont plus considérés comme des éléments d’armes et peuvent être acquis sur présentation du titre de détention de l’arme, sans déclaration ni autorisation.
Certains clubs de tir peuvent acquérir un plus grand nombre d’armes et de munitions.
Le rapport tous les six mois des ventes de catégorie B est supprimé.
Il n’est plus nécessaire de faire signer le livre des armes de catégorie C par l’acquéreur.
Les autorisations de fabrication et de commerce (AFCI) passent de 5 ans à 10 ans.
Le préavis de 6 mois pour le renouvellement de l’agrément des armuriers est abrogé.
Le dirigeant d’une structure peut obtenir l’agrément d’armurier dans 2 cas :
- lorsqu’il remplit les conditions d’honorabilité et qu’il possède personnellement la compétence reconnue par l’administration (diplôme d’une école d’armurerie ou CQP) ;
- ou bien lorsqu’en plus de son honorabilité, il emploie au moins un salarié avec la compétence reconnue par l’administration (diplôme ou CQP). Dans ce dernier cas, le dirigeant doit être titulaire d’un diplôme BAC ou équivalent, ou point nouveau avoir une expérience d’au moins 6 ans en armurerie.
L’objectif est de faciliter la reprise d’armureries et ne plus bloquer les dirigeants non titulaires du BAC, alors même qu’ils ont la présence d’un salarié titulaire de la compétence dans leur commerce.
Bien évidemment, cela ne dispense pas le dirigeant de suivre le parcours de délivrance du CQP, par la VAE ou la formation en centre, voir le parcours dérogatoire mis en place afin de détenir lui-même la compétence demandée reconnue par l’administration (diplôme ou CQP).
Mesures pour le renforcement de la sécurité publique :
Les carcasses d’armes sont désormais incluses dans le quota de détentions afin d’éviter la création d’armes « hors quota » à partir de l’assemblage d’éléments d’armes.
Les fusils à pompe à canon rayé de moins de 60 cm, de plus de 5 coups et/ou équipés de crosse pliante pour une longueur totale de moins de 80 cm sont désormais classés en catégorie B.
Rappel : tous les fusils à pompe à canon lisse sont en catégorie B.
Les carabines à pompe à canon rayé (type Remington 7600, Verney Caron, Impact LA…) restent classées en catégorie C.
L’obligation de consultation du FINIADA par les armuriers pour toute vente d’arme.
La possibilité de prononcer une suspension administrative d’une AFCI pour un motif d’ordre public.
L’interdiction de matériels pouvant être montés sur certaines armes semi-automatiques qui en accélèrent la vitesse de tir (type « bump fire » ou détente « digital »).
L’encadrement des « tirs d’initiation ».
La possibilité de signalement par les professionnels en cas de transactions suspectes.
Les générateurs et aérosols incapacitants inférieurs à 100 ml, ainsi que les shockers à bout touchant, restent classés en catégorie D. Au dessus de 100 ml ils sont classés en catégorie B au 1 août 2018.
Le statut du collectionneur qui comble un vide juridique.
Vente entre particuliers : le décret supprime toute possibilité de vente et de livraison d’armes et de munitions directement entre particuliers. La vente et la livraison d’armes et de munitions entre particuliers doit se faire obligatoirement par un professionnel autorisé (armurier ou courtier) ceci pour assurer un contrôle fiable de l’identité de l’acquéreur, de la validité de son permis de chasser ou de sa licence de tir sportif, ainsi que de l’enregistrement de l’arme et du contrôle du FINIADA.
Seules les armes vendues par un professionnel (armurier ou courtier) peuvent faire l’objet d’une livraison au domicile de l’acquéreur.
Pour les chargeurs d’armes d’épaule à percussion centrale de plus de 10 coups et inférieurs à 30 coups, désormais classés en catégorie A et utilisables dans des armes de catégorie B, ils peuvent toujours être acquis et détenus par les tireurs sportifs pour les armes qu’ils détiennent dans la limite de 10 chargeurs par arme et conversion (article 312-45), sur simple présentation de l’autorisation de l’arme en catégorie B correspondante.
La détention de chargeurs de très grande capacité de plus de 30 coups reste cantonnée à l’obligation de pratique du TSV.
Pas de changement pour les chargeurs d’armes d’épaule à percussion annulaire toujours classés en catégorie B jusqu’à 30 coups, et pour les chargeurs d’armes de poing jusqu’à 20 coups.
Date d’application
L’administration a préféré anticiper la sortie du décret en mettant la date de début d’application pour l’essentiel des dispositions au 1er aout 2018. Ce délai permet aux professionnels de se mettre en conformité tout en respectant les exigences de la directive.
Le début d’application est le suivant :
Pour l’autorisation destiné à exercer l’activité d’intermédiation pour les armes de catégorie C :
Pour les entreprises ou les personnes qui exerceraient aujourd’hui cette activité d’intermédiation pour les catégories C et D, l’autorisation administrative sera obligatoire à compter du 14 décembre 2019. Jusqu’à cette date, elles peuvent continuer à exercer leur activité, mais elles ont obligation de contrôle du FINIADA. Les ventes d’armes entre particuliers peuvent se faire jusqu’au 1er août 2018. L’obligation d’avoir une autorisation d’intermédiation s’appliquera au 1er août 2018.
Pour le contrôle des compétences des professionnels :
Les qualifications professionnelles pour exercer le commerce des armes sont précisées et complétées par le décret. Elles s’imposeront aux titulaires actuels d’autorisations au plus tard le 14 décembre 2019. Conformément à la directive, tous les armuriers dirigeants doivent à cette date justifier dans leur structure d’une compétence reconnue par le Ministère de l’intérieur. Ce délai a été donné afin de régulariser, grâce à la création d’un parcours dérogatoire (cf : http://www.fepam.fr/acces-parcours-derogatoire), le plus grand nombre d’armuriers qui exercent actuellement sous le régime de l’agrément délivré pour 10 ans en 2011 ou 2012.
La FEPAM a été chargée de la mise en place de ce parcours dérogatoire permettant d’obtenir la compétence attendue à la date butoir du 14 décembre 2019.
Une note explicative sur ce parcours vous sera adressée par la FEPAM, les organismes professionnels et les fournisseurs.
Pour les déclarations d’armes surclassées en catégorie C
- Les armes de chasse à un coup par canon lisse étaient jusqu’alors classées en catégorie D, soumises à enregistrement. Elles sont désormais classées en catégorie C, soumises à déclaration, à l’exception des armes acquises avant le 1er décembre 2011 qui demeurent non concernées.
- Les armes neutralisées qui étaient en vente libre sont désormais classées en catégorie C, soumises à déclaration.
Le décret prévoit la régularisation de la détention de ces deux catégories d’armes de la manière suivante :
le récépissé d’enregistrement des armes acquises avant le 13 juin 2017, date d’entrée en vigueur de la directive, vaudra récépissé de déclaration. Le changement de régime sera donc neutre pour les détenteurs et d’effet immédiat.
à la demande du Conseil d’Etat, les armes acquises sous un régime d’enregistrement entre l’entrée en vigueur de la directive (13 juin 2017) et l’entrée en vigueur du décret (1er août 2018), devront être déclarées en préfecture avant le 14 décembre 2019. Les modalités de ces déclarations pourraient être précisées dans les semaines qui viennent, pour alléger au maximum les démarches des détenteurs
les armes anciennement en catégorie D et désormais en catégorie C qui seront acquises à compter du 1er août 2018 seront immédiatement soumises à déclaration.
Les personnes ayant acquis une arme neutralisée entre le 13 juin 2017 et la date d’entrée en vigueur du présent décret en font la déclaration, au plus tard le 14 décembre 2019, dans les conditions fixées à la partie réglementaire du code de la sécurité intérieure.
Pour les armes de catégorie B surclassées en catégorie A
La directive surclasse en catégorie A :
- les armes semi-automatiques transformées à partir d’armes automatiques
- les armes semi-automatiques à grande capacité (plus de 21 coups en armes de poing, plus de 11 coups en carabines à percussion centrale et plus de 31 coups pour les carabines à percussion annulaire)
- les armes semi-automatiques dont la longueur totale peut être réduite à moins de 60 cm (par un dispositif de crosse amovible ou repliable.
- Pour devenir maître armurier ou fourbisseur d’armes, le compagnon des corporations de l’ancien régime, doit exécuter un chef d’oeuvre et soutenir un examen oral.
Le décret prévoit la régularisation de la détention de ces armes de la façon suivante :
Les armes pouvant être de grande capacité de par les chargeurs, fabriquées d’origine en semi-automatique pourront continuer à être acquises, détenues et renouvelées par les tireurs sportifs actuellement autorisés à les acquérir et les détenir au titre de la catégorie B.
Les armes semi-automatiques, transformées à partir d’armes fabriquées d’origine en automatique ne pourront plus être acquises à l’entrée en vigueur du décret. Les armes légalement acquises avant l’entrée en vigueur du décret pourront continuer à être détenues, sous le régime actuel d’autorisation et de renouvellement d’autorisation de 5 ans.
Les armes semi-automatiques à crosse amovible ou repliable pour en réduire la longueur totale pourront continuer à être détenues jusqu’au terme de leur autorisation d’acquisition et de détention, mais ne pourront plus être renouvelées, sauf si l’arme est transformée pour être compatible avec les critères de détention. Ces armes devront être obligatoirement modifiées (blocage définitif de la crosse pliante, allongement de l’arme …)
Conclusion :
Ce décret qui transpose la directive européenne sur les armes a fait l’objet de très nombreuses réunions de concertation entre le Service Central des Armes (SCA) et le Comité Guillaume Tell. D’autres réunions de travail ont eu lieu au Cabinet du ministre de l’Intérieur Gérard Collomb, ainsi qu’au Cabinet du Premier ministre et à l’Elysée.
Cette concertation exemplaire a permis de préserver l’essentiel de nos acquis et d’obtenir des mesures de simplification dans une situation de fortes tensions, exacerbée par la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée.
C’est dans ce contexte très défavorable que nous avons pu obtenir des dérogations pour les tireurs sportifs. De la même façon, la vente entre particuliers sera maintenue, en passant par un professionnel, armurier ou courtier, afin de conserver une réelle souplesse, notamment en milieu rural, malgré l’obligation de la consultation du fichier des interdits d’armes lors de tout achat d’arme.
Bien sûr, nous aurions aimé avoir encore moins de contraintes mais chacun sait que c’est au cours des négociations européennes sur la directive armes que nous avons perdu quelques libertés.
De la même façon, nous aurions pu profiter de cette réforme pour obtenir gain de cause sur les fusils à pompe alors que nous avons en partie conservé l’existant avec les fusils à pompe à canon rayé rallongés à 60 cm, les autres étant surclassés en catégorie B.
Sur la grande majorité des sujets, le décret répond parfaitement à nos attentes malgré un contexte sécuritaire renforcé, et va permettre aux deux millions d’utilisateurs légaux d’armes à feu de poursuivre leurs activités de façon pragmatique.
Toutefois de nouvelles négociations vont s’ouvrir dans les prochaines semaines sur les points dont les échéances d’application sont plus tardives.
De même, le FINIADA, dont la consultation devient obligatoire pour les armuriers, va faire l’objet d’un bilan critique de la part du SCA et du Comité Guillaume Tell.
Il est impératif, car les dysfonctionnements sont nombreux et trop d’honnêtes citoyens se retrouvent interdits d’armes sans réelles justifications en termes de sécurité publique.
C’est l’un des chantiers essentiels avec la dématérialisation des procédures.
Bonnes vacances
Yves Golléty
Un grand merci à Bertille Seive (FEPAM), Thierry Coste (Comité Guillaume Tell), Eric Fleischel (CNSA) pour leur contribution précieuse à la rédaction de cette note.