Gazette des armes, Avril 2004 - n° 353
Les dérives de la douane
Un sabre révolutionnaire dangereux pour la sécurité publique
dimanche 20 janvier 2008
Dans une Gazette des armes précédente, nous avions évoqué les dérives de la douane, dont les collectionneurs faisaient les frais. Quatre mois après nous faisons un nouveau point avec un peu plus de recul et des informations qui nous ont été données spontanément.
Le sous-titre de cet article semble un peu tapageur, mais c’est une affaire qui s’est réellement passée il y a quelques années. Nous allons l’étudier et aussi voir que dans des cas similaires, les collectionneurs ont pu faire valoir leurs droits et se faire restituer leurs armes anciennes.
Quand les tribunaux s’en mêlent !
Des nombreux témoignages que nous avons reçus suite au précédent article, il y en a un qui est exemplaire :
En 1999, le collectionneur se rend à une bourse aux armes en Dordogne. Il est arrêté vers 18h alors qu’il transportait des armes de 8ème catégorie et des armes blanches. Grand cirque, interrogatoire, saisie conservatoire de la camionnette, de 16 baïonnettes, 3 sabres dont un 1er Empire et d’un fourreau de sabre mle 1822. Gendarmerie, anthropométrie, bref il en ressort à 2 h 30 du matin.
Le transport de ces armes blanches était déclaré illégal par la douane. Le motif légitime de la bourse aux armes ayant été rejeté par la douane.
Alors commence un scénario hallucinant : la douane propose une amende de 5000 F (hé oui pas encore d’Euros). Notre collectionneur refuse : il est certain de son bon droit.
Puis audience en correctionnelle en son absence : sous le prétexte qu’il n’avait pu être joint par la justice. Mais la douane qui, elle, avait bien son adresse, le joint le lendemain pour lui annoncer sa condamnation : 20 000 F d’amende et confiscation des objets transportés. Incroyable !
Toujours sûr de son bon droit, il fait appel et s’en tire avec 26000 F d’amende. On croit rêver.
Dans ce cas, le collectionneur s’est mal défendu sur le plan juridique. Les tribunaux n’ont pas vu plus loin que le bout de leur nez. Les armes destinées à la destruction par le tribunal de Périgueux ont fini par trouver le chemin d’un musée.
Le pire que j’ai vu est une affaire de 1996 où un collectionneur propriétaire d’une importante collection d’armes, à son grand tort, possédait quelques armes de 1er et 4èmecatégories. La douane lui a saisi l’intégralité de sa collection, encore une fois. Mal défendu, il s’est vu prononcer par le tribunal une amende considérable basée [1] sur la valeur totale des objets saisis (les prohibés et les libres).
Huit ans après il est encore en train de payer l’amende, et sa collection est au pilon !
Dans un autre registre, j’ai eu l’occasion de voir un dossier chez un avocat où sont réunies des copies de procès verbaux sur des affaires de douane.
Je découvre la saisie (on appelle cela pudiquement : abandon de la marchandise) d’antiquités de plus de 100 ans d’âge ainsi que des couteaux non classés dans la catégorie des armes blanches (6èmecatégorie). Ces objets, rappelons-le, ne sont pas soumis à l’obligation de justification. Il s’agissait de :
une collection d’armes blanches de plus de cent ans d’âge,
des pistolets Premier Empire,
un pistolet à capsules,
et bien d’autres choses inoffensives.
A force d’insister, la douane peut reconnaître ses torts :
Dans le précédent article, nous faisions état d’un collectionneur qui s’était fait saisir 14 revolvers de la 8èmecatégorie et une somme d’argent. Il lui était reproché l’absence de justificatif. On lui proposait une amende « transactionnelle » de 6000 € . Lorsqu’il a écrit pour affirmer que ses armes, du fait de leur âge supérieur à 100 ans, n’étaient pas concernées par l’article 215, la douane l’a appelé pour lui affirmer le contraire. Devant son insistance, la douane a fini par admettre mais a souhaité faire vérifier le classement en envoyant les revolvers à l’ETBS de Bourges aux fins d’expertise.
Il a eu raison d’insister : la douane lui a restitué ses armes, rendu son argent et fermé les yeux sur une boîte de 24 cartouches en 6 mm vélodog.
Autre affaire également évoquée dans l’article de décembre :
Celle du collectionneur qui s’était fait saisir à la sortie d’une bourse aux armes, un sabre 1er Empire et une baïonnette de plus de 100 ans d’âge avec 200 € d’amende.
Finalement, avec une simple lettre de réclamation circonstanciée, il a récupéré son argent et ses armes.
Il y a quelques mois, un marchand d’armes se fait saisir en Bretagne deux sabres Premier Empire et une dague prime de Manufrance. Encore des objets non soumis. Après moult réclamations, il reçoit une lettre de la douane qui lui dit en gros : « La douane a la possibilité de saisir toutes armes blanches susceptibles de constituer une arme dangereuse pour la « santé » (sic) publique. C’est l’articulation du décret du 6 mai 1995 et de l’article 215 bis. Malgré le caractère régulier de la procédure …… j’ai néanmoins décidé de vous restituer vos armes, cela à titre tout à fait exceptionnel »
Ouf, on est passé à deux doigts du ridicule !
La conclusion de tout cela
Il est courant chez l’honnête collectionneur de courber la tête devant les uniformes à bandes rouges et « d’abandonner » les objets saisis et de payer l’amende. Car, on ne sait jamais, « on pourrait avoir des ennuis ».
Les douaniers sont comme toute la population, il y a ceux qui font bien leur travail, et ceux qui traquent « l’affaire ».
Si vous êtes dans votre bon droit, dites-le, écrivez aux directions régionales, à la direction générale, au ministre etc.. mais ne vous laissez pas faire. En laissant tomber, vous faites naître un esprit de racket qui n’est pas bon pour notre pays.
Voir aussi :
- l’application juridique de l’article 215
- un précédent article sur un sujet annalogue.
[1] l’art 414 du code des douanes permet au tribunal de prononcer une amende allant du simple au double de la valeur des objets saisis.