Les parlementaires européens viennent de voter.
Le vote de Strasbourg est tombé, alors quoi ?
Que de bruit pour presque rien !
mercredi 15 mars 2017, par
Alors que la communauté des détenteurs légaux attendaient avec impatience et espoir le verdict des parlementaires européens, les députés de Strasbourg ont botté en touche et choisi délibérément de ne pas examiner les nombreux amendements pour prendre le texte adopté en janvier lors du trilogue qui finalement n’est pas si mauvais.
Le jour du vote, le Parlement a rédigé un communiqué de presse en se félicitant de leur vote. Le communiqué renvoi à un résumé de la révision de la directive. Ce texte ayant été rédigé le 26 janvier 2017. Cela sent un peu le réchauffé. On pourrait se demander à quoi a servi toute cette mascarade de vote en assemblée plénière le 14 mars 2017 ? [Réponse]
Il faut se féliciter que le texte désastreux de la Commission ait été modifié de façon substantielle pour le rendre acceptable.
Le texte adopté (français). |
En gros, tous les parlementaires s’accordent pour dire que le nouveau texte ne change rien pour les tireurs, chasseurs ou collectionneurs. Seul les aspects du stockage en sécurité, du traçage/marquage sont renforcés.
Les collectionneurs
Le Parlement a introduit une définition du collectionneur qui est une forme de reconnaissance. Ainsi, cela ouvre la possibilité aux états de leur donner des autorisations pour des armes de catégorie B ou A. C’est un grand pas car nous n’avions pas obtenu cela en 2012 avec la loi sur les armes, malgré une forte insistance.
Les armes neutralisées :
Nous sommes interpellés face à ce que nous qualifierons de contradiction :
- d’un coté tous les parlementaires reconnaissent que le règlement européenest mal fait et qu’il faut autoriser les armes déjà neutralisées anciennement, à condition qu’il soit reconnu que la neutralisation employée est "appropriée et efficace". Cela s’appliquerait y compris pour les armes transférées entre Etats.
- de l’autre coté les armes neutralisées depuis le 8 avril 2016 devront être déclarées comme une arme de catégorie C. A noter que cela laisserait le stock déjà détenu et neutralisé avant le 8 avril 2016, hors déclaration. C’est toujours ça !
Il est facile de prédire que ces nouvelles déclarations d’armes neutralisées vont engorger AGRIPPA ou le fichier qui le remplacera, cela pour aucun intérêt pour la sécurité.
Il y a un autre point de vue : si ces armes sont considérées comme des catégorie C, il faudra un titre pour les acquérir : Licence de Tir, Permis de Chasser ou Carte du Collectionneur.
Et puis il y a un énorme paradoxe : la Carte du Collectionneur n’étant pas en place, seuls les tireurs et les chasseurs pourraient acquérir une arme neutralisée, mais ce n’est pas le type d’armes qui les intéresse bien évidemment. Tandis que les collectionneurs qui voudraient les acquérir, n’en auraient pas la possibilité juridique.
Les armes d’alarme, sonores ou de cinéma :
Elles seront désormais incluses dans la Directive. La Commission doit fixer des spécificités techniques pour éviter leur transformation pour le tir à balle. Elle annonce un règlement d’exécution.
La directive annonce que sont classées en catégorie C (déclarable) les armes transformées. Cela pourrait vouloir dire que les armes à blanc d’origine ne seraient pas déclarables ? Probablement !
Déclarer les armes d’alarme va tuer le marché. Mais c’est peut être l’objectif politique pour éviter aux personnes d’avoir le "outils" de se familiariser avec les armes à feu. C’est comme cela en Espagne.
La catégorie D est supprimée :
Il faut savoir que cela s’applique au texte européen qui ne comprend que les "armes à feu longues à un coup par canon lisse" .
La catégorie D à la française comprend 13 paragraphes contre un seul dans la directive. Ainsi les armes anciennes pré 1900 et leur liste complémentaire, les armes blanches, les armes à air, etc... ne sont pas concernées.
Les répliques :
Le Parlement a bien pris le soin de préciser que :
▪ les armes anciennes ne sont pas soumises à la Directive,
▪ les répliques "devraient" relever du champ d’application de la Directive.
Nous gageons que la France aura bien d’autres choses à faire que de faire déclarer ou soumettre à autorisation les répliques. Il faut comprendre que, de même que pour les armes neutralisées, ces formalités feraient "exploser" les fichiers. D’ailleurs, considérer la réplique à chargement par la bouche du fusil 1er Empire comme une catégorie C ou un revolver de la Guerre de Sécession comme une catégorie B relèverait d’une grande fantaisie que les journalistes, toujours avides de sensationnels, ne manqueraient pas de relever.
Voir article.
Les tireurs
Les débats ont été rudes sur l’avenir des armes longues semi-automatiques.
Finalement les parlementaires ont choisi de les faire "remonter" en catégorie A dès lors qu’elles aient au moins une des caractéristiques suivantes :
Converties à partir d’armes automatiques ou encore équipées d’un chargeur d’une capacité de plus de 10 coups.
Mais il est prévu que les Etats peuvent continuer à accorder des autorisations ou à les renouveler celles des tireurs qui possèdent déjà les armes. Il suffit d’être tireur sportif, de pratiquer activement le tir à l’entraînement ou en compétition et cela, depuis au moins 12 mois.
En résumé, cela ne change absolument rien pour le tireur, ni dans la procédure, ni dans le quotidien, le carnet de tir est suffisant pour prouver que le tireur est actif.
A noter que ceux qui voudront conserver leur arme en catégorie B pourront réduire leur chargeur à 10 coups. Mais dans le quotidien, cela n’a aucun intérêt. D’ailleurs c’est le chargeur qui classe l’arme et non le contraire.
Ainsi, si la France suit à la lettre la Directive, il n’y aura aucun changement dans les dispositions actuelles.
Craintes sur les PM et mitrailleuses à bande.
Par contre la directive insiste bien sur les trois nouvelles catégories A6, A7, A8 : l’Etats pourront délivrer des autorisation mais les armes doit correspondre à une discipline d’une fédération. Le texte dit : "l’arme à feu concernée remplit les spécifications requises pour la pratique d’une discipline de tir reconnue par une fédération de tir sportif établie au niveau international et officiellement reconnue."
Et l’on se souviens que l’ancien Ministre de l’Intérieur Bruno Leroux s’en était pris a ces armes : "D’autres mesures s’imposent sans attendre : des mitrailleuses démilitarisées peuvent aujourd’hui être acquises au titre du tir sportif. Or, ces armes sont potentiellement reconvertibles en armes automatiques, tirant par rafale, dont on conçoit sans peine la particulière dangerosité. Elles seront désormais interdites."
Les chasseurs
- Fusils à canon lisse : Il ne faudra déclarer que ceux nouvellement acquis. Mais depuis le 1er décembre 2011, ces armes étaient déjà soumises à enregistrement. Cela ne change donc rien pour les chasseurs.
Enfoncement de portes ouvertes
Les ventes à distance :
La nouvelle Directive impose la vérification préalable de l’identité de l’acquéreur et de ses autorisations. C’est déjà le cas en France pour la vente par correspondance.
Mais le texte prévoit qu’en l’absence de vérification il sera également possible de livrer par l’intermédiaire d’un armurier, d’un courtier agréé ou une autorité publique. Nous avons échappé au pire car dans toutes les versions précédentes du texte, c’était uniquement la livraison dite "face to face" qui était prescrite, ce qui aurait nié toute notion de vente à distance.
Donc la encore rien de changé pour les français.
Durée maximale des autorisations :
Elles seraient limitées à 5 ans. C’est déjà le cas en France !
Tests médicaux :
Après une longue bataille entre les parties prenantes, il a été prévu que ce seront les États qui mettrons en place leur propre système de contrôle. Donc pour la France, rien de changé, simplement le " coup de tampon et la signature du médecin sur la licence". Cela correspond au traditionnel certificat de non contre-indication demandé pour les autres sports, nous restons dans la cohérence ! Encore rien de changé.
Ce qui pourrait fâcher :
Règlements en espèces :
Les armuriers sont "invités" à refuser les transactions dites suspectes. Notamment lorsque l’acheteur fait preuve d’incompétence en matière d’arme ou de munition, qu’il souhaite régler en espèces, qu’il n’apporte pas la preuve de son identité ou qu’il achète des quantités inhabituelles de munitions.
Sur le plan sécurité, cela reste une bonne idée. Il faut voir l’application.
Perte de souveraineté :
Cet épisode illustre bien la mainmise de l’Europe qui, avec de lointains parlementaires échappant à la pression des électeurs, dicte les lois de la république.
Conclusion
Donc à priori, la montagne a accouchée d’une sourie. Mais il faut prendre en compte la phrase que Vicky Ford dans une lettre à Firearms United : "Il faut absolument que les citoyens s’assurent auprès de leurs gouvernements respectifs que ces possibilités soient appliquées au mieux."
Cela signifie qu’un gouvernement national peut toujours déraper. D’ailleurs l’art 14-4° de la directive explique bien qu’il s’agit d’un minimum de restriction et que chaque Etat peut se montrer plus restrictif mais pas plus laxiste.
L’analyse de notre association est reconnue comme pondérée et réaliste. Il se dit qu’elle tranche par rapport aux autres informations complètements paranoïaques.
Réactions : 14 mars 2017 : Communiqué de Presse du Ministre de l’intérieur, Bruno Le Roux. 14 mars 2017 : conférence de presse vidéo (en français) avec une longue intervention de Vicky Ford. Elle insiste longuement sur le fait que le texte ne change rien pour le détenteur légal d’arme à feu. 14 mars 2017 : intervention vidéo de Mylène Troszczynski qui proteste contre ce vote. 15 mars 2015 : Euractive Allemagne. Même les Suisses sont mécontents de l’Europe. |
Définitions : « Musée » , une institution permanente, au service de la société et de son développement, ouverte au public, qui acquiert, conserve, étudie et expose des armes à feu, des parties essentielles ou des munitions à des fins historiques, culturelles, scientifiques, techniques, éducatives, récréatives ou de préservation du patrimoine, et reconnue comme telle par l’État membre concerné ; « Collectionneur » , toute personne physique ou morale qui se voue à la collection et à la conservation des armes à feu, des parties essentielles ou des munitions, à des fins historiques, culturelles, scientifiques, techniques, éducatives ou de préservation du patrimoine, et reconnue comme telle par l’État membre concerné. |
[Réponse] : en fait si les amendements avaient été discutés pour aboutir à un nouveau texte, alors il aurait fallu réexaminer le texte devant le Conseil avec le risque qu’au final la Directive soit encore plus restrictive. Donc les députés ont choisis la prudence.