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Le terrorisme ouvrirait-t-il une brèche dans les fichiers ?

dimanche 6 octobre 2019, par Erwan

« L’attaque » terroriste qui vient de se dérouler à la ¨Préfecture de polices est inquiétante pour les titulaires d’autorisation. Quatre fonctionnaires de la Préfecture de police ont été assassinés au moyen d’un couteau par l’un de leurs collègues et un cinquième, gravement blessé, est actuellement hospitalisé. Notre communauté s’associe à la douleur des familles de ces hommes et de ces femmes fauchés en pleine force de l’âge, sans oublier d’adresser ses plus sincères vœux de rétablissement moral et physique à leur collègue blessé.

Nous ne pouvons que nous désoler de voir ce drame servir de prétexte à la classe politique pour lancer des attaques aussi hâtives qu’opportunistes contre le Ministre de l’intérieur ou certains de ses subordonnés, quoiqu’il semble avoir été mal informé lors de sa première prise de parole.
Ce genre de règlement de comptes nous semble d’autant moins indiqué que, bien que le préfet de police soit subordonné au ministre de l’intérieur, la Préfecture de police, où s’est déroulé le drame, constitue une entité tout à fait à part, jouissant d’une grande autonomie au sein du ministère de l’intérieur !

Demander qu’une enquête parlementaire soit diligentée pour faire toute la lumière sur ce drame, paraît beaucoup plus réaliste et bien plus raisonnable.

Nos concitoyens s’interrogent en effet sur ce qui a permis d’habiliter « secret défense », un individu dont l’état psychique et les fréquentations étaient jugés inquiétants. Il serait en particulier intéressant de savoir si le fonctionnaire chargé d’instruire le dossier d’habilitation a agi en toute indépendance ou s’il a reçu l’ordre d’habiliter d’office le meurtrier, comme cela arrive parfois, au nom de principes aussi généreux que destructeurs.
Il est important de faire la lumière sur ce point et d’être à l’avenir intransigeant sur la procédure d’habilitation. Si les français perdent confiance dans ce genre de filtre, cette série d’assassinats va empoisonner notre société. Beaucoup de Français de confession musulmane ont en effet choisi de servir loyalement la France comme policiers ou comme militaires et d’afficher ainsi leur intégration dans la Nation. Ils risquent désormais de voir peser sur leur personne un doute ou une suspicion de la part de collègues ou de camarades qui se demanderont constamment s’ils ne risquent pas un jour de « péter un plomb » et de se livrer à un carnage !
Par ailleurs, pour la Police, cet évènements porte gravement atteinte à l’esprit de corps, dont les valeurs essentielles sont la solidarité et la confiance mutuelle entre membres d’une même institution.

Le criminel a été abattu par un policier stagiaire de 24 ans, affecté depuis seulement 6 jours à la Préfecture de police à sa sortie de l’école de police. Outre son courage et sa détermination, ce jeune homme avait encore en tête les principes simples sur l’usage des armes, qui lui avaient été inculqués au cours de sa formation. Cette procédure d’ouverture du feu adoptée en 2015 après le périple sanglant des frères Coulibaly, autorise gendarmes et fonctionnaires de police, après qu’ils aient effectué deux sommations, à ouvrir le feu sur un individu menaçant des vies ou sur le point de commettre un meurtre. Dans le cas présent, ce gardien de le paix stagiaire, a appliqué à la lettre la procédure et après avoir fait les sommations d’usage, il a ouvert le feu avec son fusil d’assaut HKG36, comme il avait été formé à le faire : en tirant trois balles dans le torse puis en remontant pour en loger une quatrième dans la tête du meurtrier (procédure rendue nécessaire par le fait que de plus en plus d’agresseurs portent des protections balistiques couvrant leur torse). C’est l’exemple même du cas où un individu déterminé et bien formé et possédant un solide sang-froid peut faire basculer une situation et sauver des vies.

Parmi les victimes, certaines appartenaient au personnel administratif et n’étaient ni armées ni préparées à affronter des situations de combat. D’autres étaient des policiers, qui auraient normalement dû être porteurs de leur arme de service et ne pas hésiter à s’en servir.

Mais à la différence de l’intervenant qui sortait de l’école de police, les autres policiers, qui avaient déjà tous une certaine ancienneté et avaient très certainement été conditionnés par un mode de pensée qui a longtemps eu cours dans l’administration : « tout plutôt que de sortir son arme » et « tout plutôt que tirer ». L’expérience les a rendus conscients des sanctions et des lâchages par la hiérarchie dont avaient fait l’objet, certains de leurs collèges qui avaient eu le malheur de tirer. Nul doute que cela ait contribué à perturber leurs réactions et à créer des hésitations qui leur ont peut-être faire perdre quelques secondes vitales !

Possibles fuites dans un fichier sensible !

Le meurtrier était informaticien au sein de la direction du renseignement criminel. Il pouvait peut-être connaître l’identité et l’adresse personnelle de chaque fonctionnaire de police et la communiquer à d’éventuels complices. Les fonctionnaires de police ont encore en mémoire l’assassinat de deux de leurs collègues (mari et femme, tous deux policiers) perpétré à leur domicile par un forcené, qui avait eu connaissance de leur adresse à la suite d’un manque de vigilance concernant des fichiers du personnel du ministère de l’intérieur. Ils ont tout lieu d’être inquiets aujourd’hui.
Une autre inquiétude touche à la sécurité de ces fichiers informatiques AGRIPPA et SIA, dans lesquels sont enregistrés le nombre et la nature des armes que nous détenons et l’adresse du lieu où elles sont conservées. S’il y a eu des fuites dans ces données, chaque collectionneur, chaque tireur chaque chasseur est menacé !
Dans ce cas, les terroristes ou les malfaiteurs (il existe souvent des contacts entre ces deux milieux) connaîtront l’adresse [1] précise à laquelle ils pourront venir dérober telle ou telle arme qui leur est nécessaire !
Nos concitoyens, détenteurs d’armes, aimeraient être assurés que les informations qu’ils fournissent aux préfectures lorsqu’ils déclarent une arme ne sont accessibles qu’aux personnes « ayant à en connaître » : à savoir, dans chaque préfecture : les employés du bureau « armes » [2] que nous espérons avoir été dûment criblés par les services de sécurité et ceux du SCA.
On peut d’ailleurs se demander si AGRIPPA ou le SIA servent réellement à quelque chose [3] et si un fichier tenu à l’échelon du département ne serait pas aussi efficace et moins facilement pénétrable (à condition de ne le mettre qu’entre les mains de fonctionnaires préfectoraux parfaitement sûrs !).

Le sujet de réflexion

Ces meurtres horribles sont particulièrement révoltants. Mais ils posent aussi diverses questions :
- Sur l’objectivité de l’habilitation des fonctionnaires occupant des postes sensibles,
- Sur le bien-fondé du port permanent de l’arme administrative pendant les heures de service par les fonctionnaires de police et sur la nécessité de détruire l’état d’esprit post soixante-huitard, consistant à ne se servir de son arme à aucun prix.
- Sur l’utilité réelle d’AGRIPPA et de son successeur : le SIA

Ces horreurs ont été perpétrées avec de simples couteaux de cuisine. S’ils l’avaient été avec un sabre de cavalerie, il est probable que des voix se seraient élevées pour recommander un meilleur contrôle de la vente des sabres !

Tout cela fait écho auprès des malheureux collectionneurs d’armes neutralisées dont les « joujoux » sont devenus des tas de « ferraille » qui fait totalement oublier ce qu’est la mécanique d’une arme. Et cela découle d’un mensonge d’État ou l’on a fait croire que des armes neutralisées avaient été utilisées lors des « attentats, » alors que c’était des armes à blanc slovaque.

En savoir plus :
- Archive Ministère de l’Intérieur sur AGRIPPA.
- LCI en directe,
- La rubrique AGRIPPA sur le site UFA.
La fuite des fichiers :
- L’inquiétante fuite des coordonnées de 500 policiers : Source L’express du 11/12/2018.
- Rapport d’information sur les fichiers de police, n° 1548, commission des Lois, 24 mars 2009 : Source Assemblée Nationale 17 octobre 2018.
- Les données personnelles de 112.000 policiers ont fuité sur le web : Source le FIGARO 27/06/2016
- Les données personnelles et la protection de la vie privée à l’heure des nouvelles technologies : Source Net-iris 04/09/2015.
- Comment pirater le fichier STIC par un simple coup de fil : Source NEXTINPACT 03 janvier 2013.
- 10 conseils pour la sécurité de votre système d’information : Source CNIL 12 octobre 2009.
- 50 fichiers d’identification administrative, fichiers de police : Source rebellyon.info.
 

[1Voici une quinzaine d’années, lors de la mise en place du fichier AGRIPPA, les détenteurs d’armes soumises à déclaration, s’étaient émus d’une rumeur, qui affirmait que, pour absorber le surplus de travail que représentait la saisie de ces données, celle-ci était sous-traitée à des sociétés implantées en Afrique du Nord. Nous ignorons toujours la part de vérité que contenait cette information, mais il est certain que malgré toutes les assurances de sécurité qu’avancent les informaticiens, l’existence de bases de données qui peuvent être rapidement « siphonnées » par une entité extérieure est préoccupant.

[2Récemment, à l’occasion de l’achat d’une arme de catégorie C, un vendeur imprudent a adressé les documents de déclaration à la préfecture de notre département sans plus de précision. Ces documents ont donc transité d’un bureau à l’autre indiquant ainsi à des gens qui n’avaient pas à le savoir, que nous étions détenteurs d’armes et leur indiquant par la même occasion notre adresse !

[3Au Canada, le ministère de l’intérieur a abandonné ce genre de fichiers qu’il a jugé inutiles et coûteux. Maintenant, nous savons qu’ils sont en plus dangereux !

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