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Article paru dans la GA N°456 de septembre 2013

Satisfactions, interrogations ou déceptions !

vendredi 23 août 2013, par Jean-Jacques BUIGNE fondateur de l’UFA

Le nouveau décret est paru au JO du 2 août 2013 nous rendant ce mois estival en pleine effervescence. Les questions fusent de partout, les uns sont très contents, les autres ne comprennent pas et enfin certains sont très déçus. Nous allons rendre compte de ces différents états d’âme. Pour le contenu du décret et nos commentaires, vous les aurez au fil des prochains numéros de la Gazette, ou sur notre site Internet.

Voila tant d’années que nous parlons d’une nouvelle règlementation et que nous travaillons dessus. Elle devient applicable à partir du 6 septembre 2013.
Une première déception que beaucoup d’amateurs d’armes nous ont exprimé : pour un « contrôle des armes moderne, simplifié et préventif » [1] c’est bien compliqué. Ceux qui ont lu plusieurs fois le décret, n’y ont rien compris. En effet le nouveau décret comporte 188 articles sur 64 pages de Journal Officiel alors que l’ancien décret de 1995 ne comportait que 125 articles sur 20 pages de JO. Voir article de Jean Huon. Il faut dire que les textes juridiques n’ont pas une écriture accessible facilement.
- Petit rappel des 4 catégorie : A, B, C, D.

Les collectionneurs

Satisfactions :
Les dates du modèle de 1900 pour les armes et celle de 1946 pour les matériels, déjà inscrites dans la loi, se retrouvent dans le texte règlementaire. Cependant cette satisfaction se transforme en déception concernant l’application de cette disposition.

La neutralisation des munitions est règlementairement prévue. Reste encore à trouver un statut pour le collectionneur de munitions actives.

L’abandon du classement par calibre est pour les collectionneurs la fin d’un régime vexatoire et inadapté, qui a brimé leurs aspirations depuis 74 ans. Depuis bien longtemps, les collectionneurs espéraient un déclassement des armes en calibre 8 mm Lebel qui font partie de notre patrimoine national et sont, depuis longtemps, totalement dépassées sur le plan opérationnel.
L’arrêté du 8 janvier 1986 libérant certaines armes historiques rares d’un modèle postérieur à 1870 n’avait en effet classé en 8e catégorie que des armes de poing extrêmement coûteuses. S’il est bon de préserver de telles pièces, il faut être bien conscient que la majorité des amateurs d’armes ne peuvent financer l’achat d’un Bergmann ou d’un Webley Fosberry qui représente un budget de plusieurs milliers d’Euros. La fin du classement par calibre va ouvrir une nouvelle fenêtre au collectionneur : celle des armes règlementaires à répétition manuelle, dont on peut espérer qu’elles seront financièrement abordable pour le plus grand nombre et il convient de s’en réjouir !

Reste à savoir si l’administration acceptera de classer toutes les armes à verrou d’un système antérieur à 1900 en catégorie D ou si elle exigera que certaines d’entre elles, fabriquées en grande quantité jusqu’à des dates aussi tardives que 1950 soient classées en catégorie C. Dans un cas comme dans l’autre elles seront accessibles sans devoir subir de modification de calibre avec plus ou moins de paperasserie selon le classement qui sera décidé !

Interrogations :
La principale interrogation vient de la publication tardive du décret « collection » dont la publication n’est prévue que pour 2014. C’est lui qui fixera le régime de la carte du collectionneur permettant l’accès aux armes de la catégorie C. Il sera accompagné d’un arrêté donnant la lite des armes « libérées » d’un modèle après 1900.

Le nouveau décret ne prévoit pas la neutralisation des munitions au-dessus de 20 mm. A la veille des commémorations des cent ans du début de la 1er GM, il va bien falloir trouver une solution, sinon les communes devront démonter les obus qui ornent les monuments aux morts et les familles devront mettre à la ferraille leurs vases fleuris faits dans des douilles d’obus et qui trônent sur les cheminées.

Déceptions :
Les collectionneurs sont déçus parce que tous s’attendaient à avoir dès le 6 septembre une situation nette avec le millésime de 1900.

Or, à l’heure où nous bouclons cet article [2], nous ne savons pas quelles sont les armes dites de dangerosité avérée. C’est-à-dire celles qui, bien que d’un modèle antérieur à 1900, seront classées en catégorie enregistrable, déclarable ou soumise à autorisation.

La liste de déclassement et les modalités d’attribution de la carte du collectionneur ne seront négociées qu’à l’automne de cette année pour un arrêté prévu en 2014.

Il reste toujours une ombre sur le transport des armes de collection. Le décret (Art.173) punit d’une amende de 750 € toute personne qui porte ou transporte sans motif légitime une arme de la catégorie D. Nous souhaitons que les prochains arrêtés puissent rassurer les amateurs en élargissant la définition du motif légitime avec les réalités de la vie du collectionneur.

Les matériels militaires, dont les systèmes d’armes ont été neutralisés « doivent être conservées dans des locaux sécurisés par une alarme audible de la voie publique et par des moyens de protection physique adaptés. ». Quand on sait qu’il s’agit de : véhicules blindés ou non, avions, hélicoptères ou bateaux, on se rend compte que cette exigence règlementaire est irréaliste. Le moindre chat qui va passer dans le hangar, va déclencher l’alarme. Il faudra nécessairement adapter cette disposition.

Les tireurs

Satisfactions :
Les tireurs peuvent trouver certaines mesures satisfaisantes :
- l’âge de la majorité (18 ans) au lieu des 21 ans précédents est désormais suffisant pour faire une demande d’autorisation [3] ;
- la durée de validité des autorisations passe de 3 ans à 5 ans ;
- les 3 tirs contrôlés doivent être exécutés dans les 12 mois précédant la demande et non dans l’année civile comme auparavant, c’est donc plus souple ;
- le classement par calibre n’étant plus la référence, un certain nombre d’armes d’épaule utilisables au TAR devient accessible avec une simple licence et une déclaration au lieu de l’autorisation lourde et compliquée à obtenir et avec des délais dépassant l’année pour certains départements ;
- certaines munitions « mixtes », c’est-à-dire utilisables à la fois dans les armes de poing et d’épaule, sont classées en catégorie C par arrêté ;
- dans le quota de 12 armes, plus de distinction entre percussion centrale et percussion annulaire.

Interrogations :
Certains tireurs espéraient des dispositions pour que les demandes d’autorisations soient traitées plus rapidement. Ils souffrent des « verrous chronophages » qui peuvent aussi bien venir des commissariats ou gendarmeries mais aussi des préfectures qui sont débordées. Trois ans après, certains n’ont pas encore reçu leur récépissé de déclaration... Donc il suffit juste de gagner du temps...

Déceptions :
Mais les tireurs sont aussi déçus par plusieurs complications nouvelles :
- les armes de poing à un coup et percussion annulaire étaient hors quota jusqu’alors, leur quantité est désormais limitée à 10. A remarquer que ces armes plus onéreuses que les armes à répétition, sont délaissées par les tireurs ;
- Certaines munitions de catégorie C ne sont vendues que sur présentation du récépissé de déclaration ou d’enregistrement pour l’arme correspondante. Quand on connait les délais de délivrance... Heureusement que c’est limité à peu de calibres [4] ;
- dans la pratique les règles de conservation des armes et munitions sont inapplicables et illogiques ;
- pour les armes et munitions de catégorie B, il n’y a pas un grand changement : le détenteur doit les conserver soit dans des coffres ou armoires fortes ou encore une pièce forte dont la porte est blindée et les ouvrants barreaudés. Cette dernière disposition est une avancée pour ceux qui peuvent se le permettre. En revanche, il est étonnant que ce dispositif ne soit pas prévu pour les armes des catégories C ou D1. Ces dernières ne peuvent être conservées que dans un coffre ou une armoire forte ou encore en démontant une pièce essentielle ou enfin par « tout autre dispositif empêchant l’enlèvement de l’arme. » Difficile d’enchaîner les armes au mur qui, de nos jours, sont en placoplâtre ou en briquettes. D’ailleurs, la chambre forte ou une pièce dédiée garnie de plusieurs armoires fortes est le seul moyen d’entreposer dans de bonnes conditions et dans les règles une panoplie d’armes longues.
A noter que les munitions de catégorie B doivent être conservées dans les mêmes conditions que les armes, comme auparavant. Les munitions des catégories C et D1 doivent êtres conservées séparément dans des conditions interdisant l’accès libre.

Les chasseurs

Satisfactions :

- la fin du classement par calibre est une véritable révolution dans le monde de la chasse. Ainsi il sera possible de chasser avec des calibres jusqu’à présent inaccessibles tel le 30-06, le .308 ou le 8x57 JS.

Interrogations :
Le quota de 1000 munitions par armes ne semble pas les gêner, sauf pour les chasseurs de gibiers migrateurs qui doivent disposer simultanément d’une large variété de numéros de plombs. Et comment stocker, dans la pratique, l’excédent des 500 munitions par arme ? Le coffre étant une contrainte supplémentaire.

Déceptions :

- comme pour les tireurs, le stockage de leurs armes est problématique : le décret ne prévoit pas de pièce forte. Et comment pourront-il respecter l’obligation de stockage pendant la pause de midi entre deux actions de chasse ? Vont-t-il enchaîner leur arme à un poteau dans le restaurant ?
- le fusil à pompe est toujours interdit aux chasseurs, c’est pourtant l’arme parfaite en matière de sécurité, notamment pour les traqueurs qui doivent chambrer une cartouche au moment du tir. Situation qu’il n’ont pas avec les semi-auto. Pensont notamment aux situations où le traqueur se fait charger.
Avec un fusil à pompe, une fois le coup tiré, l’arme est en sécurité, même si le chasseur passe cul par-dessus tête. !
- depuis 1986, pour l’utilisation à la chasse d’anciennes armes militaires à verrou, les chasseurs doivent limiter la hausse à 300 m et supprimer le tenon de baïonnette, ce qui dénature l’arme. Mais aussi, c’est dommage, c’était l’occasion dans certaines circonstances de rejouer la sortie des Légionnaires à Camerone ! Mais bon, de toute façon les sangliers ne savent pas « rendre les honneurs »…. ! Ces opérations sont inutiles si l’arme est utilisée au TAR ou en collection.
- « L’enregistrement » ainsi que « la déclaration » des armes de chasse classées dans les catégories C ou D du décret visent en principe, à établir un « traçage » de ces armes, institué par des directives européennes. Cette mesure paraît définitive dans tous les pays européens où la stabilité des textes est la norme.
Toutefois, la transposition de ces directives faite par la France a de quoi inquiéter les chasseurs déjà échaudés par l’instabilité des textes de nature règlementaires (décrets).

Dans le nouveau décret, il y a des « cases vides » aux paragraphes 5 de chacune des 4 catégories, destinées à être remplies par : « Armes ou types d’armes présentant des caractéristiques équivalentes qui pour des raisons tenant à leur dangerosité d’ordre ou de sécurité publics ou de défense nationale sont classés dans cette catégorie par arrêté des ministres.... ».

Autrement dit, ce décret prépare en toute transparence un possible « surclassement » d’armes de chasse qui seraient visées par une définition « à géométrie variable » et aux conditions pour le moins « élastiques » citées ci-dessus et par simple arrêté de quelques ministres...

Les chasseurs avaient déjà été victimes en 1997 du surclassement des fusils de chasse à canon lisse, à répétition « à pompe », de la 5e à la 4e catégorie, suivi d’une spoliation par simple refus de la délivrance d’une autorisation de détention au titre de la 4e catégorie par les Préfets. Mais au moins ces mesures étaient-elles effectuées par voie de décret, un texte d’une valeur juridique supérieure au simple arrêté prévu aujourd’hui.

Les mauvaises langues pourraient y voir une latitude à l’arbitraire de l’exécutif au pays des « Libertés »...

Les restrictions
Nous le savions déjà puisque le décret découle de l’application de la loi votée, mais il faut bien être conscient que l’administration (sous-entendu le préfet) peut :
- refuser une autorisation d’acquisition ou de détention de manière discrétionnaire, c’est-à-dire sans avoir à motiver la décision ;
- confisquer une ou plusieurs armes acquises légalement.

Ces dispositions sont impensables dans un véritable état de droit dans lequel l’administration est tenue de motiver ses décisions et nul ne peut être privé de sa propriété, légalement acquise et détenue, si ce n’est pas décision de justice.
En France une telle décision ou confiscation, même temporaire, ne peut être portée que devant la justice administrative qui dépend de l’administration... Très souvent le Tribunal Administratif donne raison à l’Etat en appliquant le vieux diction de l’ancien régime « Le Roi ne saurait mal faire ». Autrement dit, le « Gouvernement » ou du moins son « Administration » ne peut mal se conduire. Dans les autres Etats de droit du monde, la contestation d’une décision de l’Administration est portée devant un tribunal de droit commun. Ainsi, le jugement est celui d’un tribunal indépendant du pouvoir exécutif.

 

[1Peut être manque-t-il une virgule entre « armes et « moderne ». S’agirait-il d’une erreur du législateur. Ce n’est pas un contrôle des « armes moderne », auquel cas il faudrait un « s » à moderne, mais un « contrôle des armes virgule moderne. ».

[2le 21 août 2013,

[3Sur ce point en 2005, l’ADT avait fait un recours en Conseil d’Etat. Elle a été déboutée mais ses arguments sur la discriminination entre les citoyens ont manifestement porté.

[4il s’agit des calibres - 25-20 Winchester (6,35 x 34 R), - 32-20 Winchester (8 x 33 Winchester) ou 32-20-115, - 38-40 Remington (10.1 x 33 Winchester), - 44-40 Winchester ou 44-40-200, - 44 Remington magnum ainsi que les calibres 7,5 x 54 MAS, - 30 M1 (7,62 x 33) - 7,62 x 51 ou (7,62 x 51 OTAN) ou 308 Winchester ou 308 OTAN, - 7,92 X 57 Mauser ou 7,92 x 57 IS ou 8 x 57 I ou 8 x 57 IS ou 8 mm Mauser, - 7,62 X 54 R ou 7,62 x 54 R Mosin Nagant, - 7.62 x 63 ou 30.06 Springfield, - 303 British ou 7,7 x 56.,

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