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Bien comprendre l’état d’urgence

vendredi 25 décembre 2015, par Maître Philippe MULLOT avocat au Barreau de Toulouse

Notre cher beau et vieux pays connaît des heures dramatiques, depuis le lâche assassinat d’une équipe de dessinateurs satiriques. Aucune foi ou idéologie ne peut justifier de tels actes. C’est mal !

Le Bataclan et son massacre ont été le point d’orgue des actions de ces b……, de ces s….., qui ont exécuté dans la plus grande tradition de lâcheté des gens comme vous et moi venus écouter un concert de « Heavy Metal ». Rejoignant au Panthéon de l’horreur et de l’ignominie les massacreurs de Constantinople, les Huns, les turcs assassins d’arméniens, les colonnes infernales de Hoche et plus récemment d’autres einzatsgruppen divers et purificateurs ethniques variés.

Alors, face à ces situations exceptionnelles, notre pays et sa classe politique ont réagi dans un grand élan d’unanimité et de solidarité en adoptant « l’Etat d’Urgence ».
C’est bien, les forces de l’Ordre vont avoir les moyens de lutter contre le terrorisme avec des moyens plus rapides. Et on espère que l’efficacité sera au rendez-vous, en tout cas on leur souhaite bonne chasse.
On entend sur l’Etat d’Urgence tout et n’importe quoi.
Celui-ci est bien encadré : durée limitée dans le temps, application limitée à des situations définies par la Loi et les Décrets en Conseil des Ministres. ET C’EST TOUT.

Il faut donc cesser de s’affoler, mais il faut quand même rester vigilants.

Toutefois, pour nuancer le propos, son champ d’application défini au départ dans le Décret n° 2015-1475 du 14 novembre 2015 qui vise les perquisitions, a été étendu le même jour par le Décret n° 2015-1476 du 14 novembre 2015 qui vise les pouvoirs de restriction de circulation aux Préfets, les interdictions de séjour, les assignations à résidence, la fermeture des salles de spectacles et débits de boissons, la remise des armes, et les réquisitions.
Bon, jusque là, c’est l’état d’urgence pur et dur qui doit viser les méchants (normalement) et qui est appliqué par une administration préfectorale consciente de ses responsabilités.

Et c’est là que ça commence à déraper !!!!

Disons le : certains fonctionnaires ont une attitude qui va dans le sens de mesures qui, d’actions que, etc….
On sent que, si certains résistent à des pulsions répressives, d’autres commencent à se lâcher en croyant agir dans le cadre légal de l’Etat d’Urgence.

Alors je le dis ici, que ces gens ne pensent pas une seconde que si nous avons accepté la diminution de nos libertés fondamentales pour le bon motif de la lutte contre le terrorisme, nous n’accepterons pas que l’on touche à nos armes afin que certains fonctionnaires anti armes puissent réaliser leurs idées.

Nous serons vigilants, nous vous demandons de nous signaler toute dérive ou action « bizarre ». Je ne dirai pas « nous avons des noms !!! », mais qui peut dire de quoi demain est fait ?
Car même si nos libertés sont temporairement restreintes, il est toujours possible de signaler les actions que nous jugeons « anormales ou inamicales » à la hiérarchie. Le droit d’expression existe toujours, lui.

Alors je cite en vrac quelques dérives :

- les demandes de justification d’utilisation d’armes de catégorie B4 (en 5,56 et 7,62x39) sous menace de dessaisissement en cas de non réponse sous 10 jours.
- les demandes portant sur la notion de la trop grande quantité d’armes de catégorie C détenues avec possible convocation au commissariat.
- l’utilisation extensive des mesures concernant le dessaisissement.
- les nombreuses erreurs des fichiers du TAJ qui transforment l’honnête victime en vilain auteur.
- les récentes perquisitions chez des tireurs sportifs en « profitant » de l’Etat d’Urgence.

Alors on nous dira « vous avez des garanties ».

Il faut savoir que les « garanties » obtenues lors des négociations sont inefficaces. En effet l’arrêt « Chemouni » permet toujours à l’administration de ne pas motiver les décisions administratives concernant les questions d’ordre public et de sécurité. Alors, pour se défendre ce n’est pas facile-facile. Imaginez : vous demandez "pourquoi", on vous répond "parce que," et là ce n’est pas une plaisanterie, c’est la vraie vie.
Le poulet que l’on va rôtir a aussi des garanties, dont celle d’être bien attaché sur la broche. Si,si, c’est important au niveau éthique.

Donc double vigilance, d’abord contre les terroristes, et ensuite sur la défense de nos droits.

Et n’oublions pas que si la fin peut justifier les moyens, les moyens ne doivent pas nous faire dévier du but ultime : une société libre, respectueuse des droits, égalitaire, fraternelle. Parce que si on l’oublie ça devient rapidement une France unie, grande, libre (devise fasciste type espagnol) et là ce n’est plus pareil !!!!

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Maître Philippe Mullot

Une dernière précision, au niveau de ces actions anti-armes il existe au niveau légal une « bêtise » que je ne peux exposer ici mais si vous êtes la victime d’une de ces demandes de remise émanant des préfectures contactez-nous vite car les délais sont courts, il est à priori possible de faire quelque chose.

Bonne Année à Tous.

Lire aussi :
- Motivation des décisions de l’administration
- une jurisprudence construite pierre par pierre.
 

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